Maude Girard
Ma Reine
FotoMasterclass #8
Une couveuse. Subtil mélange de sécurité et d’inconfort.
Cheminer au travers de ses contradictions. Affiner sa vision. Creuser plus profond. Faire la lumière sur la part d’ombre. Chercher sa voix. Commencer, recommencer et ensemencer. Recevoir. En découdre et en démordre. Lâcher l’égo. Absorber. Donner. Se laisser bousculer et consoler. Métamorphoser. Trouver l’écho. Peaufiner. S’accompagner. Et puis soudain, ouvrir les yeux et se retourner.
Une couveuse à plusieurs pour grandir de créer.
À vous trois, FLORE, Sylvie, Adrian, aux expert.e.s et à la merveilleuse troupe d’éclaireur.euse.s, mille fois merci.
Maude Girard
Colette, Ma Reine, est ma grand-mère maternelle.
À mes yeux, elle a toujours représenté la féminité, le contrôle, l’élégance et la froideur.
« Ma Reine » est mystérieuse, chic, autoritaire et intouchable.
Pourtant, un puissant lien transgénérationnel nous relie, au-delà des mots et malgré la distance émotionnelle qui nous sépare.
Enfant, ses nombreuses injonctions m’accompagnent, adolescente elles me pèsent, adulte elles m’interrogent.
En février 2018, je décide de m’intéresser à elle et de dépasser l’incompréhension. Je la questionne, la photographie, elle et ses objets. Elle a 93 ans, j’en ai 29.
Est-ce que je la connais mieux maintenant ? Pas vraiment. Est-ce que j’ai percé le mystère ? Non plus.
En février 2020, Colette s’éteint et me laisse, avec plus d’interrogations que de réponses.
Une mémoire de femmes incomplète et fragmentée. Mais aussi avec un sentiment d’amour inconditionnel à son égard. Une admiration pour sa force. Et l’envie de lui rendre hommage avec des images crues mais des intentions tendres.
À travers « Ma Reine », qui lui survit, j’exhume les injonctions répétées en boucle, à l’image des perles d’un collier transmis de mère en fille. En les exposant à la lumière, je les dépossède de leur pouvoir. Je guéris.
L’appareil photo et l’écriture me servent d’instruments pour mettre en relief un héritage dont je découvre les contours, tente d’en déjouer les pièges, et qui sait, peut-être même m’en affranchir.